lundi 18 juin 2007

426 jours

Fleur, tu vas casser la baraque à Bobigny....

426 jours et presque autant d’nuits
Que j’passe partout sauf dans un lit.
J’ai perdu mon boulot y’a un an et d’mi
Et à 55 ans, pour en r’trouver un, j’te mets au défi l’ami.
Ma femme en a profité pour m’annoncer qu’elle avait un amant ;
Elle a d’mandé le divorce en disant : « J’garde la maison, la friteuse et les enfants
Prends l’micro-onde et la bagnole
J’te laisse aussi la tondeuse et la batt’rie de casseroles ».
Mais heureusement j’avais des potes sur qui compter,
Enfin c’est c’que j’pensais, j’ai vite déchanté
Eux m’ont pas fait l’coup d’l’amant mais d’la p’tite amie
« J’suis désolé Jean-Mi mais Nathalie vient s’installer ici
Et elle veut faire un dressing dans la chambre d’ami ».
J’ai donc divorcé d’mes amis, à l’amiable cette fois-ci.
La voiture aussi ça n’a duré qu’un temps
Les émeutes de Clichy ont eu raison d’ma Fiat 500.

426 jours et presque autant d’nuits
Que j’me suis improvisé guide Mich’lin d’Paris.
Ma spécialisation ? Ponts, impasses, squats et taudis.
Un bibendum au moral dégonflé
Avec un bide quant à lui bien enflé ;
Un GPS sur pattes qui n’a plus la patate.
C’qui me bouffe le plus, c’est même pas d’rien avoir à grailler,
C’est d’devoir ravaler ma fierté et d’me mettre à mendier.
Ca j’vous jure j’arrive pas à digérer.
Et comme si c’était pas assez humiliant,
J’dois supporter vos regards méprisants.
C’est vrai qu’des fois avec votre fric j’achète du pinard
Mais c’est l’seul truc qui m’fait oublier ce cauchemar.
Vous m’donnez tous la gerbe avec vos résidences secondaires
Alors qu’les trottoirs de Paris sont ma résidence primaire
Et qu’mon caviar à moi, c’est les restos du cœur et la soupe populaire.

426 jours et presque autant d’nuits
Qu’la solitude m’a envahie, qu’mon ombre est ma seule amie.
J’me passerai bien d’ce fantôme de la vie
Car comme amant ou confident, y’a mieux, j’vous l’dit.
Les seules personnes qui m’ont soutenues
En vrai j’les ai jamais vues.
Coluche, l’Abbé Pierre et les autres j’trinque à vot’ santé.
La vie les a emporté alors qu’elle aurait dû leur offrir l’éternité.
C’est vrai qu’y’en a qui r’prennent le flambeau,
Qui essaient d’améliorer l’destin des clodos,
Mais la flamme qui brûlait dans leurs yeux à eux deux
Me f’sait t’nir et croire que d’main ce s’rait mieux.
Alors j’erre, me perds, espère et désespère,
Et finis par penser au pire, par oublier que moi aussi j’suis père.
Mais pour mes gosses j’suis rien de plus que leur géniteur
Qui à la sortie de l’école leur fait honte et peur.

Alors p’t-être que dans 426 jours et presque autant d’nuits
J’aurais grimpé dans la hiérarchie :
D’en d’ssous d’un pont j’serai passé au-d’ssus
Et d’un saut j’rejoindrai les autres qui trop vite ont disparu.

Fleur (2007)

3 commentaires:

outtaseezun a dit…

hey hey hey oui oui, faut publier les autres, hein Fleur? enfin peut-être pas tous? je sais pas, Fleur Fleur t'es là???

Professeur V a dit…

Oui, Fleur, un poème, juste un poème comme celui-ci!

Il est comme le vent qui fait chanter les violons
et emporte au loin le parfum des roses
Carambars, bonbons et chocolats

Je t'en prie!

Il est pour moi la seule musique...
qui fait danser les étoiles sur les dunes
Carambars, bonbons et chocolats

Poème, poème, poème
Ecoute-moi!
Poème, poème, poème
Je te jure!
Poème poème poème
Je t'en supplie, juste un poème!

Jean-Alain Padelon

Anonyme a dit…

Un p'tit coucou! Je suis tombée tout à fait pa hasard sur ce site et franchement je lisais sans même savoir qu'il était de toi et... j'adore! C'est tout simplement vrai et bien écrit! Félicitation!